BACHLA

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Echo des terriers du mois de janvier 2020

Bonjour ! Je vous emmène, aujourd'hui, rencontrer, au Japon, un animal migrant qui vit chez nous, déprécié, mal aimé, sans-papiers !

 

Lointain cousin des loups, des renards et du bichon frisé qui se prélasse sur votre canapé, le tanuki, ou bake danuki, que l'on nommait avant le 13ème siècle, Mujina, est au pays nippon un yokai, entendez un esprit. Il fait partie des sept divinités de la bonne fortune. Présent dès le moyen âge sur les emaki (rouleaux peints), cité dans le Nihon Ryoiki, recueil de contes populaires bouddhistes, et le Nihon Shoki, œuvre magistrale qui contient de nombreuses archives historiques ainsi que les origines du Japon.

Il figure en amulette de terre cuite, statufié par les céramistes de Shigaraki, sur les façades de nombreuses maisons, magasins, restos et bistrots...

 

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Les tanukis sont traditionnellement coiffés d'un chapeau de paille, ils portent un tsûchô (livre de comptabilité), une gourde de saké, et une énorme paire de glandes reproductrices. Ayant naturellement, dans la vraie vie, un scrotum surdéveloppé, l'on prête depuis la nuit des temps, à ces débonnaires canidés, la faculté de tendre la peau de leur ventre et de leurs attributs, à la manière de peaux de tambours, afin de battre le tempo par les nuits de pleine lune ! Le son obtenu fait partie de la culture cinématographique nippone : l'onomatopée "Pompoko pom pom" titre un film d'animation délirant qu'aucun japonais ne saurait ignorer ! Quand ils ne servent pas de tambour, les "amourettes" des tanukis, appelés "kinbukuro" (sacs d'argent), ou kintama (boules dorées) , peuvent servir accessoirement de parapluie, de bateau, de parachute, de baluchon, de couvertures, de filet de pêche, etc... ! Pour la petite histoire, cette étrange et ahurissante faculté trouverait son origine dans le travail d’orfèvres des métallurgistes de la préfecture de Kanagawa. Ceux-ci avaient l’habitude d'envelopper l’or qu'ils travaillaient dans cette membrane souple et étirable afin d'obtenir, en martelant le précieux métal, de fines feuilles de qualité !!!

 

Pour qui visiterait l'île au soleil levant, quelques temples sont dédiés au kami tanuki (dieu tanuki). Le Yashima-ji à Takamatsu et le Chingodô à Asakusa en font partie. Au temple Morin-ji de Tatebayashi, l'on retrouve la bouilloire du célèbre conte populaire Bunbuku chagama ! Dans cette histoire qui apparaît au XVIIè siècle, un bûcheron sans le sou libère un tanuki d’un piège. Souhaitant le remercier, le tanuki se transforme en chagama (bouilloire en métal utilisée dans la cérémonie du thé), et dit à l’homme de le vendre. Un moine du temple Morin-ji, achète la bouilloire-tanuki et la place sur le feu. Ne supportant la chaleur, le tanuki fait réapparaitre ses membres et s’enfuit du temple.

 

De retour chez le pauvre bûcheron, le tanuki lui suggère de proposer une attraction payante à la population : celle d’une théière qui marche et danse sur une corde raide. L’homme y trouve la fortune, et le tanuki un foyer. Après ce succès, la théière serait retournée au Morin-ji. Elle y est, à ce jour, toujours visible !

 

Figurant au top 5 des animaux les plus réputés de l'Archipel, aux côtés des ours, du chat léopard du Bengale, de la grue "tancho", et du tamia de Sibérie, le tanuki est usuel dans le langage courant japonais... "tanuki neiri" (dormir comme un tanuki) illustre une façon de faire bien répandue dans les transports en commun japonais : il s'agit tout bonnement de faire semblant de dormir pour se dispenser d'avoir à céder sa place, à une personne âgée, ou à une femme enceinte !



Introduit en Russie, sous Brejnev, comme animal de fourrure, le tanuki n'a pas attendu l'effondrement du bloc et la chute du mur pour transfuger vers l'ouest et changer de nom ! Après une observation, il y a 60 ans, en Allemagne, on retrouve le "chien- martre" en France dans les années 70... Bien qu'aucune étude scientifique ne semble vraiment l'étayer, on accuse Nyctéreute procyonoides, c'est son appellation latine, de colporter la gale, la peste, l'échinococcose, la rage, de nuire aux couvaisons d'une partie de l'avifaune, et que ne sais-je encore.

 

Omnivore, ce pauvre cabot ne compte sur l'hexagone, du fait, que très peu d'admirateurs ! Fiché par nos responsables de l'environnement sur la liste des migrants nuisibles, sa tête est mise à prix. "Wanted" il est chassable, piégeable à souhait, vous ne le verrez vivant qu'en captivité, dans les quelques zoos qui le produisent. Certains, je le sais, qui aime les animaux, les sans-logis, les sans-papiers, dans l'illégalité, s'en feront un ami, voir le diront bon compagnon...

De la hauteur du renard, proche du blaireau et du raton laveur, volontiers montagnard, ce persécuté qui a une placide bonne bouille de gentil bandit reste une présence invisible et mythique pour la plupart des coureurs des sous-bois et forêts. Je voulais vous parler dans ce premier courrier de l'année du chien viverrin, à qui j'espère pour 2020 un peu de paix et de sérénité...

 

J'en profite pour souhaiter "Yoi tabi o" (bon voyage) à notre ami Gwendal. Présent lors de nos grandes expos, Gwendal rejoint ce samedi sa seconde patrie de coeur : l'île du soleil levant. Et le paradis joyeux des facétieux tanukis !



29/01/2020
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