BACHLA

BACHLA

l'echo des terriers du mois de mars 2024

Prologue : envolée poétique. 

 

S’empressant de botter du pied le séant de sieur Hiver, le troisième mois de l’année nous égaie par son ode printanière...

Mars, que berce la caresse des astres ! Mars, qui éveille de leur torpeur, hérissons, papillons, loirs, lérots, muscardins !

 

Et cependant que la pousse de l’ortie crève le sol, que fleurit le lierre terrestre, la primevère, le prunelier, le «poup» cristallin d’un alyte-accoucheur tinte joyeusement d’une cavité secrète. Martèlement du pic épeiche, merle qui siffle fleurette, ah, paix de mon âme : Mars chante avril, les voltiges des hirondelles, le babillage des fauvettes, les croassements de la mare !

 

Energie folle, cette puissance qui jaillit des profondeurs du sol. Un véritable défi pour qui demeure tétanisé dans le givre de la désespérance. Allons, toi, debout, si tu veux encore soutirer ! Et voici notre cueilleur de sève qui ahane, grimpant, d’un pas alerte, rejoindre le fût droit de son frère le Bouleau. Il installe au pied de l’arbre le seau de la récolte, déverse le contenu de sa musette usée : une chignole, une mèche de 6, un opinel, un tuyau translucide, une cordelette pour bien fixer le seau au tronc.

 

Lorsqu’il s’agenouille pour inciser son « donneur », l’humain frêle contemple l’arbre fort. Les lois de la nature les soumettent tous deux à la même longévité, songe-t-il, et puisqu’ils ont à peu près le même âge, leurs flammes de vie devraient s’éteindre à peu d’intervalle l’une de l’autre. Les doigts, amicalement, se posent, caressent la peau craquelée si rugueuse au toucher. « A la vie, à la mort, mon vieux frère !».

Arborescence :

 

Végétal de l’hémisphère nord, ce joyau argenté vénéré par les amérindiens, les peuplades celtes, scandinaves et slaves, se déclinent au travers du monde par plus de 40 cultivars. Le plus petit, le betula alba nana boréal, ne mesure que quelques dizaines de centimètres, quand le plus grand, le bouleau jaune américain dont l’écorce cousue assurait la flottaison des canoés anciens, tape dans les 30 mètres de haut.

 

Le moins svelte, l’« himalayen » s’étend, aussi large que grand.

 

Le bouleau est un arbre « tzigane » : un nomade. Les graines qui enfantent sa descendance, parachutées par les vents, s’essaiment ici et là, peuplant les espaces pauvres, esseulés, dégagés. Deux espèces fréquentent communément les vallons de notre belle vallée : le verruqueux (blanc, crevassé, noir à sa base ; c’est le plus répandu), et le pubescent (habitant des marais, zones humides et tourbières).

 

Le bouleau figure sur la liste des arbres conseillés pour qui veut cultiver la biodiversité. Les multiples fentes verticales et exfoliations horizontales, qui lui ceinturent tronc et branches, abritent généreusement chenilles et larves de toutes sortes.

Essence de lumière, taillable dans sa hauteur, il ne gêne, ni ombrage outre mesure. Offrant ses loges multiples pour une flopée d’insectes, il attirera mésanges, troglodyte, pouillots, sittelles, grimpereaux... Le bouleau blanc, vous l’aurez compris : c’est l’auberge rouge ! Les sanctuaires spacieux lui réserveront un petit emplacement ensoleillé aux côtés du sorbier.

Conçu pour redonner aux sols appauvris un humus riche et fertile, sa présence sera une bénédiction pour les essences plus gourmandes appelées à lui succéder. « Que ce monde est bien fait… », songe encore le cueilleur, en contemplant les rameaux fin prêts à bourgeonner. Ils porteront sous peu les bractées qui à l’automne prochain, une fois tombée à terre, enrichiront le compost, lit nourricier des larves de nos cétoines et autres oryctes nasicornis (scarabée rhinocéros).

 

Outre sa sève, la boulaie, boulinière, bétulaie a de tout temps fournie aux hommes un bois précieux. Utilisé tour à tour pour la fabrication de raquettes, lunettes, bobines à fil, sabots, filets, assiettes, cordes, corbeilles, revêtements de toitures, pâte à mâcher, pâte à papier, le bouleau fut aussi, aux côtés du tilleul, un bois de chauffe prisé par les boulangers. Et si l’écorce octroie un goudron dont on badigeonnait naguère, pour éviter d’agaçants grincements, les roues des chariots, l’industrie alimentaire en extrait enfin un sucre bien connu des diabétiques et diététiciens en herbe : le xylithol.

 

Bien choisir son arbre…

 

Il est bon de choisir un arbre bien branchu : plus il y a de bourgeons à ouvrir, plus il y aura de sève à monter. L’arbre  ne ni sera trop jeune, ni trop vieux : 30 à 70 ans ! Le diamètre minimum sera de 30 cm et les arbres isolés seront préférés aux arbres trop serrés. La qualité nutritive de votre récolte dépendra bien entendu des richesses présentes dans le sol…

 

 

 

Passons à la sève…

 

Entre la mi-février et la lune de mars, les grains d’amidons stockés dans les cellules du bouleau vont peu à peu se dissoudre et être assimilés. Les cellules de nouveau vides, par un mécanisme d’osmose et de pressurisation, vont se gorger de sève. Les radicelles de leurs côtés vont aspirer au sein des racines les nutriments nécessaires au débourrement des bourgeons. L’arbre, jusqu’à l’ouverture des feuilles seulement, nous laissera le « perfuser » d’un peu de son « sang ».

 

Comment percer le bouleau?

 

Pour ma part, je privilégie le flanc le moins exposé à la pluie et aux vents. Je perce à 0,50 cm du sol, forant un trou de 8mm, à 3 ou 5 cm de profondeur, selon la taille de l’arbre. Sur la centaine de litres qui s’achemine chaque jour, il me versera généreusement mon litre quotidien. Certains spécimens aspireraient 500 lt et pourraient donner jusqu’à 10 lt/jour !

 

Après une nuit gélive, la source se tarit, il suffit de ramoner pour réamorcer l’écoulement. Quand l’arbre ne veut rien donner, il a ses raisons. Il faut refermer et passer à un autre. 

 

Pour refermer la « blessure », j’utilise une cheville bien ventrue, de même bois, un tantinet plus épaisse, légèrement taillée en pointe, que j’enfonce au marteau. Ne négligeons pas le soin, n’oublions pas d’appliquer sur la plaie un badigeon au goudron de Norvège. La récolte se fait, selon les régions, parfois jusqu’à la mi-avril.

 

La fermentation naturelle de la sève…

 

La sève se conserve quelques jours au frigo. A partir de 5° commence la fermentation. L’eau se trouble, un dépôt blanc se dépose au bout de quelques jours sur le culot de la bouteille : c’est normal. Cela ne dégrade que le côté gustatif,  la sève fermentée peut paraître rebutante, elle n’en est que plus stimulante. Il est possible de retarder, voir même d’annuler cette fermentation…

 

Pour ce faire, certains préconise l’ajout de quelques clous de girofles (conservation théorique 1 mois). On peut sinon filtrer l’eau de bouleau via une membrane de 0,22 microns (conservation 3 semaines). On peut la stocker sous vide (conservation 1 an). The must : ajouter 10 cl d’alcool de fruit à 50° pour un litre. Je viens de gouter ainsi une sève tenue trois ans. La congélation n’est guère recommandée pour qui souhaite profiter de l’ensemble des bienfaits de notre eau de jouvence.

 

Comment faire la cure ?

 

Pendant 3 semaines, il est préconisé, hors repas, en trois fois, un petit « 15 à 25cl » de sève pure. Certains poussent à 5 semaines s’il s’ensuit aux premières prises, des urines chaudes et abondantes, des selles malodorantes ! D’autres refont une cure en automne, ou alternent 3 semaines de cure, 10 jours de repos, 3 semaines de cures, 10 jours de repos. Bon, ce n’est plus très 4 saisons. (Personnellement, je ne compte pas et m’avale quotidiennement au minima mon litron…).

 

Comment bénéficier des oligoéléments ?

 

Il faut garder un peu en bouche chaque gorgée d’eau.

 

Quels seraient les bienfaits de cette cure ?

 

Aux dires des vieux grimoires des herboristes, La sève de bouleau drainerait, hors rate, reins, poumons et foie, les toxines qui encombrent. La sève, riche en minéraux, oligoéléments, acides aminés, sucres, antioxydants, vitamines A, E, D3, C, B1, B2, B3, B5, B6, B8, B9, B12, K1 (…) facilite l’évacuation des déchets organiques, stabilise le cholestérol et l’acide urique. Elle agit en profondeur sur les troubles urinaires. On la dit bénéfique pour la vésicule biliaire, la circulation sanguine, les problèmes de peau (eczéma, psoriasis, acné…). Elle éclaircit le teint, soulage certaines douleurs articulaires. Ceux et celles qu’insupportent rondeurs et disgracieux contours, prêteront l’oreille : on lui prête des valeurs amincissantes...

 

Le silicium permettrait de lutter contre l’ostéoporose. Le calcium et le phosphore interviendrait dans la solidité des os. Le potassium rééquilibrerait le rythme cardiaque. Le magnésium et le lithium permettraient d’améliorer l’humeur (états dépressifs). La vitamine C et le sélénium contreraient les méfaits du stress... La sève libère dans les intestins un antalgique anti-­inflammatoire et diurétique. J’ai découvert aussi sur une publicité que la sève éliminerait les calculs ! Ne nous emballons pas : dans sa cure, le Docteur Tétau conseillait  300 jours d’absorption.

 

L’objectif : réduire, non détruire… Les mots s’emboitent au dedans ma tête à la manière d’un inventaire à la Prévert.  

 

Détruire. Printemps d’Ukraine. A ¾ d’heure de vol en MIG-31, toute cure est vaine. L’Europe de l’est fait résonner ce bruit de bottes et canons qui rend serein les marchands de larmes.

 

Le mot de la fin :

 

La sève de bouleau est un cadeau que le bon Dieu nous offre. Un verset biblique me vient en pensant aux opportunistes, bons vendeurs, bons  marchands, qui écoulent leur sève au prix d’un Holder dit mélodie d’octobre. Matthieu, chap.10, v.8 : « Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement… » 

 

Ceci étant écrit, je me risque à nous espérer un monde meilleur qui ne serait plus géré par la concupiscence des banquiers, des faiseurs d’armes, hommes de guerres, hommes d’affaires.

 

Un monde sans mégères, ni quiconque pour médire, convoiter, fomenter, voler, mentir, ourdir.  En attendant Godot, je lève mon verre : un gewurzt’ grand cru Goldert des caves de Maurice Schueller, qui vient de m’être offert.

 

Zut, c’est carême, il me faut reporter ce rdv après Pâques ! Santé tout de même, et peut-être à bientôt pour un prochain écho.

Du FIN fond de la vallée de Munster : votre ami Jojo !



09/03/2024
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