BACHLA

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Echo des terriers de décembre 2022

 

Bonjour !

 

Les pieds chaussés de mes bottes de 7 lieues, je m’en vais aujourd’hui vous emmener dans l’une des prairies échevelées qui bordent ma closerie. Cependant qu’en lisière de clairière, la futaie se dévêt sans pudeur, s’offrant nue à l’hiver, ici et là, comme des touffes de poil sur une joue mal rasée, croissent, hirsutes, mes ronciers. Certains, adeptes du tout est propre et rangé quand c’est bien dégagé, jugeront sans doute l’endroit peu soigné. Mon Dieu qu’en ce bas monde l’on juge vite ce que l’on ne comprend pas. Qui cultive la ronce, en fourrés, sauvegarde, qu’on se le dise, l’un des micros-habitats les plus précieux que comptent nos campagnes. Tout est bon dans le roncier. Cependant que fruits, feuilles, fleurs nourrissent invertébrés, insectes, oiseaux, petits mammifères, grands gibiers, l’enchevêtrement des lianes, le dessous des feuilles, le couvert épineux, permettent à bon nombre de nicher. Colonisatrice des endroits ouverts et dégagés, friches, talus, haies, fossés, la ronce protège de l’appétit du cerf les essences faisant les bons sous-bois : chênes, tilleuls, hêtres, aulnes, noyers…

Le roncier. Voici donc à qui cet avant-dernier Echo de l’année est dédié. Selon sa variété et son exposition, la floraison de ses jeunes pousses, appelés turions, se déclinera du blanc pur au mauve pâle. Peu parfumée, la fleur du murier sauvage est puissamment mellifère ; son nectar abondant attirera naturellement tout ce que l’environnement compte de butineurs.

Ainsi qu’il en est de l’ortie, le roncier est une plante-hôte formidable qu’affectionnent par centaines, chenilles, papillons et pucerons. L’entomologiste ne sera pas seul à scruter le feuillage, les insectes suceurs, broyeurs, chasseurs, seront eux aussi à l’affût… Syrphes, coccinelles, araignées, fourmis, grandes sauterelles, punaises et mouches de toutes sortes s’y côtoient qui attirent les asiles, frelons, guêpes, bourdons. Durant l’été, l’agrion et la demoiselle se laissent photographier : ma mare à libellules est toute proche.

L’ornithologue ne sera pas en reste. Chacun dans la nature devenant la proie d’un autre, il pourra mitrailler à son aise tout ce que l’avifaune compte en oiseaux portant poignard pour bec. Rouges-gorges, mésanges, troglodytes, accenteurs mouchet, fauvettes, ne sont pas là que pour nicher, mes « Ravaillac » en plumes sont outillés pour pourfendre, embrocher, percer. Les baies nourriront les granivores, en témoignent les crottées pourpres qui maculeront la végétation environnante !

 

Mes amis du Groupement d’Etudes des Mammifères Alsaciens, le savent bien : le murier sauvage régale tout le monde. Le loir, le lérot, le muscardin, le mulot dit sylvestre, sont fans des drupéoles juteuses de ce fruit qui fait les bonnes confitures. C’est dans la drupe, plus que dans la pulpe, que réside leur graal : les pépins durs qui nous courroucent et ne se délogent qu’avec peine et cure-dents, sont convoités par ces joyeux lurons pour leurs taux élevés en protéines.

Le sol abritera, à l’instar des carabes, de nombreux cuirassés, l’escargot, le cloporte, le feuillage composté nourrira le lombric : que du bonheur pour nos musaraignes. Les protecteurs des amphibiens trouveront quelques batraciens, et sous les billes de bois laissées là-dedans pour hôtels à insectes, le triton, la salamandre. Enfin, et cela nul naturaliste ne saurait l’ignorer, la ronce est pour le chevreuil un distributeur de repas qui fonctionne toute l’année. Un rond d’herbe aplati trahira son passage, un poquet de « smarties », les résidus d’un bon repas ! Le sanglier, le renard, la fouine, le cerf, le blaireau, si peu aimés des agriculteurs, aviculteurs, forestiers, squattent l’inextricable bosquet qui permet, dans un trou, une trouée, de se dissimuler en journée. Le roncier favorisant les bonnes chasses : Elmer, pour une fois, saluera ma présence.

 
 

Je ne saurais manquer d’énumérer les nombreuses vertus que l’on prête au cousin du framboisier. On use des feuilles, des fruits et des racines du roncier, en herboristerie, en phytothérapie, pour soulager les troubles menstruels ou intestinaux, les irritations de la bouche et de la gorge, les asthénies, la goutte, la cystite, les hémorroïdes, la diarrhée, la dysenterie, le diabète... Vous l’aurez compris par ma plaidoirie, qui veux bien jardiner son refuge survivaliste cultivera le roncier !

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A très bientôt pour le prochain Echo du Don Quichotte des plantes et des petites bêtes , ton ami Jojo !



13/12/2022
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